Quel est le point commun (ou plutôt la différence…) entre une raclette et une étude portant sur 50 cas d’usage ? Récemment, la portée de nos différents posts sur Linkedin nous a quelque peu amusé – plus honnêtement, elle nous a interloqué. Nous avons alors souhaité partager nos expériences de communication sur le réseau, en nous posant des questions sur l’algorithme du réseau social. Quels posts favorise-t-il ? S’intéresse-t-il à la forme ? Au contenu ? Finalement, LinkedIn est-il un réseau réellement professionnel ?
La photo d’une raclette plus efficace qu'une étude de 60 pages
Commençons par l’élément déclencheur qui nous a donné envie de partager notre expérience. Dernièrement, nous avons publié une étude, gratuite dans sa version numérique, fruit de 6 mois d’un travail intense ayant mobilisé consultants, managers et associés. Après plusieurs teasers, nous avons annoncé sa sortie sur LinkedIn, via le compte Keley Consulting, comptant environ 4 000 abonnés. Notre post a donné des résultats en dessous de nos attentes : 1 100 impressions, 38 clics et 24 réactions (likes). Le taux de clics reste faible (3,4%) et seuls l’engagement (7,2%) et le nombre de partage (18) sont satisfaisants.
Comme nous aimons faire des posts un peu plus « légers », nous avons publié une photo d’un repas d’équipe – une raclette, peut-être cela a-t-il son importance – un vendredi après-midi. À l’heure où j’écris, ce post a dépassé toutes nos publications précédentes : 15 000 impressions, 1200 clics (sur une image !), presque 120 réactions, un taux de clic à 8% et un taux d’engagement à 9%.
Comment l’expliquer ?
Le fonctionnement de l’algorithme LinkedIn
Les grands principes de l’algorithme
> Ce que favorise LinkedIn
• Les posts comprenant du texte et une photo ont le meilleur reach, ensuite viennent les vidéos uploadées sur la plateforme (pas avec un lien), puis les posts avec du texte seul
• Les hashtags sont importants (3 maximum), même si ce ne sont pas les plus suivis et même si vous créez le vôtre
• L’engagement dans la première heure est crucial (likes et commentaires) pour qu’un post vive et soit poussé à plus d’utilisateurs
• Il est recommandé de mentionner des personnes et des entreprises, mais ceux-ci doivent absolument réagir, voire mieux, commenter
• Enfin, avoir un profil « expert absolu » est un minimum pour que Lindekin considère vos posts comme qualitatifs
> Ce que pénalise LinkedIn
• Cela peut se comprendre, LinkedIn n’aime pas que vous incitiez les utilisateurs à quitter le réseau. LinkedIn pénalise donc les posts avec des liens externes
• Les partages sont désavantagés puisque LinkedIn considère qu’il n’a plus à pousser un post, si d’autres publications permettent de lire ce post
• Les comptes qui ne publient pas assez ont des posts moins performants, LinkedIn ne vous attribuant pas un score de confiance suffisant
• A contrario, les comptes qui publient trop sont défavorisés et leurs posts seront moins poussés car trop rapprochés. Le réseau préfère en effet mettre en avant le contenu d’un maximum d’utilisateurs afin de les valoriser et ainsi de les garder comme actifs
• Les articles, fondement de LinkedIn au début du réseau, ne fonctionnent plus. Pour la même raison que précédemment, si vous passez trop de temps sur un post, vous allez en manquer beaucoup d’autres, et ce n’est pas dans l’intérêt de LinkedIn
> Ce qui ne compte pas sur LinkedIn
• La taille du réseau n’est pas une variable impactant la portée d’un post, seule sa qualité compte
• Le type de réaction (like, idée, applaudissement…) est encore trop récent pour que ça ait une incidence (ou alors l’incidence n’est pas encore publique)
• L’historique des publications n’est pas pris en compte. Une publication virale n’entraîne pas une mise en avant de la prochaine publication
Comment et quand poster ?
LinkedIn est un réseau qui s’adresse à des professionnels, il faut donc identifier quand ses utilisateurs sont sur le réseau et ont le plus tendance à interagir. Voici les meilleures pratiques :
> Préférer les mardi, mercredi et jeudi
Ce sont les jours les plus travaillés de la semaine. Les lundi et vendredi sont préférés par les Français pour prendre des jours de congés ou de RTT. Ce n’est pas l’idéal pour favoriser l’engagement.
> Prioriser les horaires « temps de trajet »
Peu de professionnels regardent LinkedIn pendant les horaires de bureau. Pour maximiser la portée d’un post et optimiser l’effet « engagement pendant première heure » décrit plus haut il faut privilégier :
• Entre 7h et 9h : c’est l’heure idéale car les Français commencent leur journée ou se rendent au bureau. Le réflexe avant une journée de travail est donc de parcourir leur fil d’actualité professionnel. S’il y a moins de monde connecté qu’à 12h, on peut provoquer l'engagement à cette heure matinale pour rendre un post viral toute la journée, et donc profiter de moments où il y a plus de monde pour toucher un plus large public. Le moment est idéal pour publier des actualités.
• Entre 12h et 14h : l’heure où le plus de monde est connecté car il constitue les courts moments autour du déjeuner. C’est un moment idéal pour poster et rendre une publication virale. Il restera cependant moins de temps dans la journée pour maximiser la portée qu’en matinée. La priorité est à donner aux publications courtes
• Entre 17h et 19h : beaucoup d’utilisateurs se connectent en fin de journée, avec des attentes plus légères qu’en début de matinée. Ça reste un moment idéal pour partager des expériences et des posts moins « professionnels ».
Comparaison de la portée des posts Keley
Étude de 60 pages vs photo d’une raclette
Revenons sur les deux posts ayant motivés cet article. Les différences sont considérables, les voici à date du 10 décembre 2019 :
Comment l’expliquer ?
Évidemment, le post sur notre étude n’est pas optimisé pour l’algorithme LinkedIn, contrairement au post sur le repas d’équipe (une photo et des commentaires des personnes mentionnées). Mais pour beaucoup de critères, c’est un choix délibéré que nous assumons pour plusieurs raisons :
• Nous avons inséré un lien, parce que la volonté première du post est de favoriser le taux de clics – et donc le téléchargement de l’étude. Remplacer le lien par une photo et mettre le lien en commentaire aurait amélioré la portée, mais réduit considérablement le nombre de clics sur le lien
• Nous avons mentionné trop de personnes (11, pas toutes actives sur le réseau), mais nous tenions à remercier tous les contributeurs de l’étude. Cela a défavorisé la perception qu’a eu LinkedIn de l’engagement sur le post, même si cela n’était pas notre objectif de faire réagir les personnes mentionnées.
• La publication a été partagée 18 fois, ce qui est indépendant de notre volonté, mais a pénalisé sa portée (tout du moins la portée du post fait par Keley Consulting)
• Malgré un moment idéal (le mardi à 17h45), l’employee advocacy a été plus difficile à mobiliser pour profiter de la « première heure » compte tenu de l’heure de publication. Nous ne souhaitions cependant pas attendre le lendemain matin, puisque notre étude a été distribuée à des contacts privilégiés en milieu de journée. Il fallait donc que l’ensemble de nos contacts voient notre formulaire de téléchargement, avant que l’étude ne circule en interne entre services.
• Le texte était légèrement trop long (980 caractères), mais nous avions besoin de donner envie de télécharger l’étude, à travers un teasing de son contenu.
Pourtant tous ces choix qui vont à l’encontre de l’algorithme Linkedin ne sont pas rédhibitoires, la qualité étant le premier critère d’évaluation – et nous pensons humblement que cette publication était qualitative. Et notre post raclette allait lui aussi à l’encontre de quelques principes :
• Le moment choisi était loin d’être idéal : le vendredi à 15h30
• Nous avons mentionné encore plus de personnes (16, soit tous les participants)
• Nous n’avons pas intégré de hashtag
Même mises bout à bout, ces raisons ne peuvent pas expliquer l’écart statistique abyssal entre les deux posts. Comment l’expliquer ? Est-il possible d’intéresser réellement nos cibles lorsque l’on utilise LinkedIn pour de l’acquisition ?
Une variable non mesurable à prendre en compte : le comportement des utilisateurs
LinkedIn a incité les contributeurs au social selling avec la création du Social Selling Index et la pénalisation des liens. Le réseau préfère que les utilisateurs remplissent leurs objectifs sur le réseau, plutôt qu’en acquisition sur leurs propres plateformes. Les utilisateurs ont ainsi trouvé une formule pour engager les utilisateurs : se vendre en tant que personne – et l’on voit naître les premiers influenceurs Linkedin.
Cela passe par des techniques diverses et souvent contestables :
• Raconter des histoires, relater des expériences – mais pas forcément véridiques
• Valoriser des comportements différents mais justes – mais pas forcément authentiques
• Conforter son lectorat avec des prises de positions – mais pas forcément originales
Certaines de ces techniques s’affranchissent même des règles les plus élémentaires comme le plagiat, avec des contenus « empruntés » comportant en guise de dédouanement la mention « lu sur LinkedIn, auteur inconnu ».
Au final, il y a de moins en moins d’informations utiles professionnellement sur LinkedIn. Le réseau devient de plus en plus un Facebook mesuré ou premium, c’est-à-dire n’abordant pas de sujets trop politiques, n’ayant pas clickbait media ou médias attrape-clics (les liens externes étant défavorisés, c’est là tout le génie de LinkedIn) et où les commentaires restent courtois (de moins en moins). La plupart des utilisateurs recherchent de l’image, des moments de vie et de la motivation. Racontez-leur une belle histoire, ils vous écouteront. Offrez-leur une expertise, ils continueront de scroller.
Une seule recommandation : utiliser LinkedIn en fonction de vos objectifs
Cela peut paraître évident, mais tout le monde n’utilise pas LinkedIn pour les mêmes raisons. Depuis de le début de cet article, nous avons beaucoup parlé de la portée des posts. Mais dans un but d’acquisition, la portée ou les impressions n’ont d’intérêt que si l’engagement suit ! Si vous souhaitez attirer des visiteurs sur votre site, il est préférable de faire un post qui aura une audience limitée, mais plus engagée.
Tout est une question d’objectifs et d’équilibre. Au sein de Keley, j’essaye de développer la notoriété, l’image et la génération de leads pour la marque. Parce que les trois objectifs sont liés et chronologiques. Si on ne vous connait pas, on ne vous aimera pas, et si on ne vous aime pas, on ne vous contactera pas. Mais mon travail ne sera pas forcément mauvais si personne ne nous contacte. Il se peut que mon travail serve bien mieux les objectifs de nos managers, qui ont une mission commerciale, que mes objectifs d’acquisition.
Des posts différents pour chacun de vos objectifs
L’outil LinkedIn peut répondre à vos objectifs de différentes façons :
• Des posts qui présentent votre marque et la fassent connaître : le but ici est uniquement de faire des vues, tout en ne portant pas de message dégradant pour l’image
• Des posts qui valorisent votre marque et ses expertises : le but ici est de présenter vos métiers, vos compétences, vos équipes, en faisant des vues mais surtout en engageant
• Des posts qui participent à votre tunnel de conversion : le but ici est d’attirer vers un point de contact, soit direct (numéro de téléphone, email dans le post), soit indirect (rediriger vers un site)
Pour ce dernier point, le nombre de vues ne doit pas être un KPI, seuls les clics et/ou les contacts doivent être mesurés pour juger de l’efficacité. Par exemple, notre post sur notre étude a eu 1 100 vues seulement, pour 38 clics. Pourtant, et bien que ce ne soit pas le seul moyen d’acquisition, nous savons que l’information a circulé. D’abord notre post a été partagé 18 fois, et ensuite nous avons enregistré près de 150 demandes en 2 semaines.
Nos enseignements après une année 2019 d’A/B Testing sur Linkedin
Nous avons essayé beaucoup de choses en 2019 sur LinkedIn. En mixant nos résultats sur 70 posts avec notre stratégie d’employee advocacy, voici quelques astuces pour optimiser votre stratégie :
> Contourner l’algorithme pour partager vos liens externes
LinkedIn n’aimant pas les liens externes, une solution commune vise à publier le lien en commentaire. Si vous publiez depuis un compte corporate, le faire via un compte personnel est un bon moyen de booster l’engagement facilement. Le lien est présent et vous avez déjà un commentaire. Mais le lien est alors beaucoup moins visible, surtout si vous avez beaucoup de commentaires qui arrivent, il va se retrouver noyé. L’astuce est alors de laisser le post construire sa viralité 30 minutes, puis de modifier le post en y intégrant le lien. À l’heure actuelle, il semblerait que LinkedIn ne change pas le score de votre post. Mais ça peut ne pas durer…
> Mentionner les équipes et les inciter à réagir
L’une des clés pour avoir plus de vue est de mentionner entreprises et personnes, et que celles-ci réagissent au post, avec un like ou mieux un commentaire. N’hésitez dons pas à tagger vos équipes et à leur demander d’interagir avec le post.
> Interagir avec les publics cibles
LinkedIn ne pousse pas votre contenu à tout votre réseau, mais à un échantillon. Il convient alors d’identifier vos cibles prioritaires dans votre réseau pour interagir régulièrement avec elles. LinkedIn les gardera ainsi au plus près de votre activité.
> Renforcer l’employee advocacy
Les pages entreprises ont un reach bien inférieur aux profils personnels. C’est normal, les pages entreprises sont la cible prioritaire de LinkedIn pour vendre de la publicité (posts sponsorisés), l’algorithme leur accorde ainsi un score inférieur et pousse le post à un échantillon encore plus petit – par exemple notre « pire » post a réalisé 667 vues, sur 4000 abonnées. Inciter vos employer à parler au nom de votre marque peut alors vous aider à atteindre vos objectifs.
> Rédiger ses articles sur Linkedin
Si vous souhaitez démontrer votre expertise, vous pouvez rédiger un article sur LinkedIn Pulse, plutôt que de mettre un lien vers votre blog. Vous aurez plus de vues, et vu que le contenu sera identique, ce sera forcément bénéfique. Si votre objectif est l’acquisition, utilisez la même technique en proposant dans l’article LinkedIn Pulse un extrait de ce que vous voulez dire puis un lien vers votre blog ou site.
> Tenter d’intéresser plutôt que d’être intéressé
Le fondement de la viralité d’un post reste l’utilisateur, qui va s’arrêter ou passer votre post. La règle numéro un à respecter sera toujours d’offrir quelque chose en plus à votre public, tout en restant authentique. Vous êtes sur LinkdedIn pour intéresser votre audience, le reste suivra seulement si vous y arrivez.
LinkedIn est aujourd’hui l’outil numéro 1 dans les réseaux sociaux pour les entreprises. Mais comme le montre cet article, il reste complexe à maîtriser pleinement : contenu, technique, mobilisation des équipes… Les process sont souvent longs à mettre en place et ne sont en plus qu’une infime partie d’une stratégie Social Media plus globale. Je n’hésite pas moi-même à mobiliser nos consultants pour faire progresser notre propre communication.
[1] https://www.LinkedInsights.com/the-LinkedIn-algorithm-explained-in-25-frequently-asked-questions/
Sources :
https://www.LinkedInsights.com/the-LinkedIn-algorithm-explained-in-25-frequently-asked-questions/
https://www.webmarketing-conseil.fr/quel-meilleur-moment-publier-les-reseaux-sociaux/
https://www.1ere-position.fr/blog/quand-publier-sur-linkedin/
https://www.linkedin.com/pulse/3-astuces-simples-et-rapides-pour-am%C3%A9liorer-la-port%C3%A9e-dimitri-ribal/