On parle beaucoup du Design thinking comme d’une méthodologie, or, le design thinking comporte un certain nombre de méthodes et de compétences qui s’acquièrent souvent avec l’expérience. Je parlerais donc plutôt d’un principe, avec un état d’esprit. Il serait dangereux de limiter la pensée design à une méthodologie à suivre scrupuleusement et je vais tenter de m’expliquer. L’enjeu aujourd’hui, au-delà d’appliquer une méthode, c’est est de pouvoir insuffler cet état d’esprit dans la conception de services, de produits, mais aussi à la stratégie des entreprises, des organisations, à l’enseignement, aux systèmes de soins et autres grands défis du 21e siècle.
Le design thinking, à la recherche de sens
La pensée design a pour objectif de créer des solutions pertinentes et opérationnelles après avoir identifié avec clarté et lucidité la véritable problématique, dans toute sa complexité (contexte, utilisateur, …). Pour cela, le designer s’appuie sur tous les éléments et les personnes qui peuvent le faire avancer dans sa démarche. Il ne s’agit pas de suivre une recette prête à l’emploi. En fonction des contextes, des enjeux ou des contraintes, le designer devra parfois inventer ses propres outils.
La pensée design n’est pas seulement centrée sur l’homme, elle est profondément humaine en soi. La base de cet état d’esprit, c’est la capacité à appréhender son environnement (ou celui de ses clients) dans sa globalité, avec humilité et enthousiasme. Questionner le réel pour l’utiliser comme point de départ afin d’identifier les vraies problématiques à résoudre. Ensuite, les designers font appel à leur sensibilité et créativité pour générer des idées, imaginer des solutions et les tester (en essayant de les confronter à la réalité du terrain) pour en tirer des enseignements.
Finalement, le Design Thinking s’affranchit des méthodologies, le fil d’Ariane, c’est la recherche de sens. C’est cet objectif qui structure la démarche de bout en bout. D’ailleurs, et pour finir de prouver qu’il ne s’agit pas d’une méthodologie ni d’un modèle unique, plusieurs interprétations de la démarche ont été proposées, voici par exemple celle de Jeremy Gutsche, de l’université de Stanford, qui a proposé une vision de la pensée design en 5 étapes.
Il en existe d’autres variantes, car l’humain a besoin de schématiser des process pour les partager et mieux les appliquer. Dans les années 80, Rolf Faste proposait une version en 7 étapes, qui ne prenait pas en compte l’empathie, étape cruciale pour chercher à comprendre les utilisateurs, le(s) contexte(s) et leurs attentes.
Le design thinking, vecteur d’innovation et source de différenciation
La nature fondamentalement exploratoire de la pensée design rend le processus non-linéaire et itératif, et permet souvent de déboucher sur des découvertes inattendues qui méritent d’être approfondies. Il se peut même parfois que l’équipe doive revoir le(s) postula(s) de départ ! Les tests auprès des utilisateurs sont par ailleurs de formidables sources d’informations qui ouvrent parfois des marchés insoupçonnés et potentiellement plus rentables. Un processus alimenté par la pensée design aboutit souvent à des résultats qui se démarquent remarquablement de ceux des systèmes linéaires. Processus linéaires qui par ailleurs, aboutissent généralement à des résultats faciles à copier par la concurrence.
Tim Brown expliquait que pour qu’un produit ou un service ait de la valeur, tant pour l’entreprise que pour ses utilisateurs, il faut qu’il réunisse plusieurs dimensions. Il doit :
- Être désirable
- Être réalisable techniquement
- Être économiquement viable
Les équipes de designers doivent naviguer entre ces 3 composantes indissociables et doivent être capables d’en trouver le bon équilibre. Faire un choix parmi elles serait une erreur et source d’échec à plus ou moins long terme. Par exemple, l’innovation communément intégrée aux modèles économiques des entreprises, priorisant l’efficacité à la nouveauté, explique en partie l’uniformité des produits ou services que nous rencontrons.
Les limites et l’intérêt du Design Thinking
L’innovation optimisée prend du temps, car elle nécessite investigations et potentiels retours en arrière. Mais penser qu’il s’agit d’une approche à avoir systématiquement et à appliquer méthodiquement peut avoir un effet négatif. Il faut être capable de définir quand et sur quels sujets appliquer des démarches itératives et très axées sur la recherche. Il parait évident que pour se rendre compte qu’un site internet a besoin d’un compte client pour rassurer ses utilisateurs, les nombreuses heures passées en entretiens client n’ont que peu d’intérêt. Un audit UX expert aurait suffi. Le Design Thinking a réellement vocation à reposer les problèmes pour imaginer des solutions qui sortent des bonnes pratiques conventionnelles. Les équipes pluridisciplinaires qui composent les projets doivent permettre de libérer la créativité dans les entreprises en permettant à tous de participer. C’est donc surtout très utile pour imaginer de nouveau services et de nouveaux produits.
Le temps nécessaire est lié aux études comportementales et sociales, et aux aller/retours qui peuvent exister dans le projet. Mais il est à rappeler que perdre 2 ou 3 mois de travail pour réellement créer de la valeur est dérisoire, si l’on compare l’argent et le temps souvent investis sur des projets linéaires qui se soldent par un échec, car ils ne rencontrent pas l’adhésion des clients finaux. Finalement, mieux vaut se tromper tout de suite, lorsqu’il est encore temps de revoir sa copie.
Keley est fier d’accompagner ses clients en mettant en œuvre la puissance du design thinking, pour les sortir des champs habituels de réflexion et les aider à mieux se positionner auprès de leurs cibles et à se démarquer par l’innovation.
Ouvrages à lire si vous souhaitez approfondir le sujet :
L’esprit Design de Tim Brown (Pearson 2014, 2ème édition 2019)
Le Design Thinking par la pratique de Véronique Hillen et Florence Mathieu (Éditions Eyrolles, 2016)