Les temps changent. Les Directions des Systèmes d’Information ont parfois été laissées sur la touche au début de l'ère digitale mais elles font un retour en force depuis quelques années. Les informaticiens se réapproprient le digital et cette évolution est positive. Mais s’agit-il d’un retour à la case départ ? Rien n’est moins sûr.
Une révolution digitale d'abord impulsée par le métier
Début des années 2000, les équipes marketing ont souvent pris l’initiative sur le digital. Cette situation arrangeait tout le monde. Les DSI n’étaient pas toujours à l’aise avec les technologies du digital, domaine qu’elles ne considéraient pas comme état cœur de métier.
Vues des équipes métier, les équipes informatiques internes manquaient souvent de réactivité. Après des années de croissance des effectifs, les DSI étaient parfois devenue un état dans l’état, embourgeoisées, bureaucratiques et difficiles à bouger. Autre critique : une difficulté à comprendre les enjeux créatifs et ergonomiques liés au web. S’engouffrant dans la brèche, les web agencies ont comblé le vide laissé par les intégrateurs traditionnels. Elles devenaient parfois des DOSI parallèles.
Le développement d’offres cloud a donné un pouvoir nouveau aux métiers. Emblématique de cette évolution, Salesforce a su surfer sur la vague en proclamant le 'no software'. Plus de serveur à gérer, plus de bases de données à administrer, plus d’hébergement à prévoir. Un sentiment de liberté gagnait les équipes marketing. Pendant longtemps tenues par les contraintes informatiques et par des délais toujours jugés trop longs, ces équipes se sont senties pousser des ailes.
Les DSI à nouveau sur le ring
Cette situation a créé des excès. Les offres digitales se sont développés parfois sans connexion avec les systèmes existants, privant les sociétés de synergies. Le shadow IT, un terme qui désigne l’informatique développé en dehors des murs de l’informatique, a aussi causé des problèmes, à commencer par des failles de sécurité et une sous-optimisation en matière de coûts.
Début des années 2010, on assiste à une nouvelle évolution. Les sujets digitaux, placés à l’ordre du jour des comités exécutifs, deviennent stratégiques. Avec des taux de croissance à 2 voire 3 chiffres, le digital a fini par représenter un poids important dans les ventes.
L’ensemble des processus internes sont touchés, créant un fort besoin d’intégration avec les process et les outils internes. Dans la distribution, la mise en place de parcours multicanal se répercutent sur le CRM, les systèmes de paye et bien sûr la logistique. Les DSI redeviennent dès lors un passage obligé.
Le digital est aussi entré dans une logique d’industrialisation, avec des volumes de transactions significatifs et des enjeux significatifs sur la data. Devant ces enjeux croissant, les DSI ont réussi à rassurer en interne en proposant des solutions robustes, scalables et pérennes. Chacun son métier. Celui de l’informatique est de construire des systèmes solides et complexes.
Trouvez le bon équilibre
Dans certains cas, cette mutation s’est faite à la dure pour les DSI, avec licenciement des directions historiques. Rajeunie, les équipes ont fait leur mutation culturelle. Les DSI se sont appropriés les méthodes agiles propres au digital. Elles savent désormais travailler avec des cycles courts en étroite symbiose avec le marketing
Les dogmes ont aussi, et c’est heureux, vécu. Le NIH (not invented here) n’est plus de mise, tout comme le recours à des logiques de suites logiciel uniques (IBM, Microsoft, SAP). L’hybridation informatique devient désormais la norme. On s’ouvre de même plus facilement à l’open source, y compris dans les secteurs traditionnels comme la banque ou l’assurance.
L’évolution est loin d’être achevée, même si le retour arrière à un conservatisme IT excessif est une tentation toujours présente. Les directions doivent encourager une implication plus forte des DSI dans la transformation digitale dont elles sont l’une des chevilles ouvrières. Elles doivent maintenir un subtil équilibre avec le métier et ses exigences d’agilité toujours croissantes.