L’Intelligence Artificielle apparaît parfois dans l’imaginaire collectif comme l’atout ultime des GAFAM et des BATX pour tirer profit commercialement des citoyens. Il existe pourtant des applications bien plus nobles. J’ai par exemple assisté à une conférence illustrant un tout autre apport de l’intelligence artificielle : la santé.
L’organisateur de cette conférence est le Groupe X-IA, groupe d'anciens diplômés de Polytechnique ayant pour but de favoriser les échanges entre passionnés de l'Intelligence Artificielle.
Il est facile d’imaginer comment l’IA peut intervenir dans le domaine de la santé. En rêvant un peu, les médecins pourraient consulter à distance et plus rapidement en ayant un pré-diagnostic et un dossier complet établi par une intelligence artificielle. Les chirurgiens pourraient avoir une visualisation plus efficace et plus précise pour guider leurs interventions. Les chercheurs pourraient être aidés dans la conception des médicaments, dans les protocoles de tests et d’essais cliniques mais aussi dans la prédiction des effets thérapeutiques pour chaque personne. La personnalisation des soins serait le pendant de la personnalisation des ventes et du marketing.
De fait, tous ces rêves ne sont plus inaccessibles et on peut même dire que les chercheurs n’imaginent plus de se passer de la contribution les outils de l’IA pour arriver à bout de cancers ou de maladies rares.
Cependant, comme a dit la professeure Anita Burgun, médecin spécialiste en bio statistique et informatique médicale, la santé est le domaine le plus complexe pour l’application de l’intelligence artificielle, en cumulant des difficultés et obstacles majeurs.
La collecte et la nature des données est la première difficulté. Les données sont principalement des données de diagnostic écrites par les médecins et qui nécessitent une approche particulièrement fine de textmining. De plus, ces données sont fortement protégées par le RGPD qui exige l’obtention de consentement des patients pour chaque finalité de traitement des données or les finalités futures sont inconnues au moment de la collecte. Par ailleurs, l’anonymisation des données réduit sensiblement son intérêt pratique (recherche de cas similaires, demande de complément d’information, croisement d’information entre services, …) sans pour autant être non réversible comme imposé par le texte de loi (3 dates de visites hospitalières suffisent à identifier un patient).
La seconde difficulté est liée à la variabilité extrême des cas qui est similaire à celle du domaine juridique, elle résulte de la multiplication du nombre de maladies par les spécificités de chaque patient.
S’ajoute à cela, que le domaine est en perpétuelle évolution que ce soit pour le quotidien des patients, l’apparition ou la découverte de maladies et les protocoles de traitements appliqués.
Tout cela, heureusement, ne décourage pas les médecins, chimistes et mathématiciens qui s’attaquent au sujet avec enthousiasme et en particulier de nombreuses start-up.
Volta médical s’est consacré à l’assistance logiciel des cardiologues durant leurs interventions chirurgicales en identifiant les zones de la paroi intra cardiaque causant l’arythmie cardiaque.
Owkin a une ambition plus large et souhaite accélérer et améliorer la découverte de médicaments et globalement rendre la médecine plus efficace grâce à l’utilisation de données.
Iktos veut intervenir dans le processus de recherche de nouveaux médicaments, dans le domaine des « petites molécules » en trouvant des molécules ayant le profil optimal pour répondre au besoin avec toute sa complexité.
Anamnèse disrupte le métier du médecin en lui offrant un assistant virtuel qui va collecter les informations nécessaires et aider le patient à préparer sa consultation ou téléconsultation via son portable.
Gleamer se focalise sur l’assistance des radiologues en analysant l’imagerie médicale et en leur fournissant un compte rendu détaillé, en commençant par les traumatismes et lésions osseuses.
Thérapixel travaille aussi sur l’imagerie médicale mais sur le dépistage du cancer du sein au service du chirurgien pour lui faire gagner du temps et de la précision.
N’était pas présente une startup que nous apprécions particulièrement chez Keley, Cureety qui propose une plateforme visant à améliorer le parcours de soins des patients atteints d’un cancer.
Merci donc à Jeremy Haroche, Président de X-IA (et de Quantmetry) pour l’organisation de cet événement et à l’ICM de la Pitié-Salpêtrière qui nous accueillait, espérant que cela révélera des vocations parmi la nombreuse audience de jeunes polytechniciens et de chercheurs en IA. D’autant que d’après une étude que nous avons réalisée [1] au sein du Groupe Keley, la population française semble prête à franchir le pas. 54% d’entre elle pense que l’IA peut améliorer la prévention et les soins apportés.
[1] Étude Yougov pour Keley Consulting, réalisée en juillet 2018 auprès d’un échantillon représentatif de la population française.