Après une première partie de l’année destinée à se mettre en conformité pour la RGPD, la directive sur la distribution d'assurances [1] (DDA) impose aux assureurs et aux courtiers de nouvelles mesures concernant les modes de distribution des produits d’assurance, cette directive impacte également l’expérience clients des assurés.
Les nouveautés de la directive reposent sur 4 piliers
Cette directive constitue un pas de plus vers le renforcement de la protection des assurés, qui ont déjà vus leur capacité de résiliation accrue. Cette fois c’est le devoir d’information et de conseil qui devra être standardisé et les process de gouvernance et de surveillance des produits qui devront être renforcés pour garantir une conformité à l’intérêt et aux besoins des consommateurs. Elle repose sur 4 piliers :
- Un renouveau du devoir d’information et de conseil : elle impose une standardisation de l’information précontractuelle et la traçabilité du conseil donné. Désormais les assureurs devront remettre à leurs intermédiaires un document d’information précontractuel destiné à informer le client pour tous les produits d’assurance.
- Des comités de gouvernance produits renforcés : les assureurs devront vérifier que les produits qu’ils conçoivent et qu’ils distribuent sont conformes à l’intérêt et aux besoins de leurs clients. En pratique, la DDA exige qu’une stratégie de distribution soit formalisée pour chaque produit d’assurance, en adéquation avec le marché cible prédéfini, les réseaux de vente doivent également être adaptés afin que le mode de distribution du produit corresponde au marché cible prévu.
- Transparence des rémunérations et prévention des conflits d’intérêts : les dispositions de la directive ont pour objectif de prévenir et gérer plus efficacement les conflits d’intérêts pour s’assurer qu’ils ne portent pas atteinte aux intérêts des clients. Elles obligent notamment les distributeurs à plus de transparence concernant leur rémunération.
- Mise en place d’une formation continue : Les salariés participant directement à la distribution des produits d’assurance devront participer à une formation continue.
La DDA, une réforme résolument customer centric impactant toute la chaîne de création, de suivi et de distribution des produits
A travers ces 4 piliers nous voyons que cette réforme va impacter le travail de nombreuses équipes et les forcer à réorganiser leurs méthodes de travail :
- Marketing : les processus de création et de suivi des offres sont à adapter, des analyses des besoins clients pour chacun des produits doivent être mise en place
- Distribution : le devoir de conseil et d’information impacte directement les cycles de vente, les agents devront être formés pour intégrer ces nouveaux éléments
- Organisation : la rédaction des documents, des fiches produits et notices d’information va devoir être adaptée pour les rendre plus lisibles pour les clients et conformes au formalisme imposé
- Systèmes d’information : impact sur les parcours clients des sites web, sur les sites de vente et sur les outils de reporting et de back office
Au-delà des changements organisationnels qu’elle va impliquer, cette directive apparait comme une vraie opportunité pour les assureurs et les courtiers qui, tout en se mettant en conformité, vont pouvoir revoir tous les process de création et de suivi des produits, analyser le besoin de leur assurés, afin de mieux comprendre leurs clients.
En effet l’assurance continue de souffrir d’une mauvaise réputation auprès des consommateurs. Il est donc possible de capitaliser sur cette directive en ne se limitant pas à appliquer la réglementation, mais en s’appuyant sur ces évolutions pour aller plus loin et offrir une nouvelle expérience aux clients qui saura les fidéliser et renforcer la confiance des assurés envers leurs assureurs. Pour cela les méthodes UX semblent être particulièrement pertinentes car elles permettent de comprendre les besoins clients et d’entrer dans un cycle d’amélioration continue.
Adopter une approche UX pour se mettre en conformité
La Cartographie de l’expérience client
Une analyse du portefeuille produit existant est essentielle pour la mise en conformité, il est donc intéressant à cette étape d’écouter la voix du Client pour cartographier son expérience en identifiant ses points de frictions et ses points d’enchantement. Cela passe notamment par une analyse des réclamations, analyse des refus, analyse de la consommation du produit en fonction de la typologie des clients et une analyse des parcours à travers les différents canaux. En adoptant cette méthode de cartographie, il sera possible d’analyser l’impacts clients des différents produits, de valider que la stratégie de distribution mise en place correspond au marché cible prédéfini, et d’identifier les produits à risques afin de les adapter.
Design thinking et lab client
La directive règlemente la formalisation des processus de création des produits. C’est une bonne occasion pour adopter design thinking, en replaçant le consommateur au cœur de la démarche.
Une fois la cartographie faite, avec une meilleure vision client il sera possible de construire des personas pour chaque cible de clientèle, en partant de son besoin réel. Des ateliers d’idéation permettront ensuite de designer de nouveaux services, qui seront testés et optimisés grâce aux retours des clients. L’objectif de cette démarche est d’inclure des tests utilisateurs tout au long du processus de création et de vie du produit :
- Des interviews durant la phase exploratoire du besoin
- Des focus group par exemple pour tester les concepts produits ou s’assurer que les fiches d’informations sont bien compréhensibles pour les consommateurs.
Les produits sont alors co-construits avec les clients de bout en bout.
Des indicateurs permettant d’évaluer l’expérience client de l’utilisateur peuvent enfin être définis, et intégrés aux comités de gouvernances produits. Les chefs de produits pourront dès lors s’inscrire durablement dans une dynamique d’amélioration de l’expérience client, en pilotant leurs portefeuilles produits en se basant sur la valeur du produit pour le client.
Cette réforme doit entrer en vigueur le 1er octobre 2018, elle implique des changements importants, mais représente une opportunité pour les assureurs qui peuvent revoir en profondeur leurs process pour ne pas se limiter à cette contrainte règlementaire, en l’utilisant comme un tremplin pour améliorer l’expérience client et offrir des services à plus forte valeur ajoutée à leurs assurés.
[1] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex%3A32016L0097